Véronique ATTIA

06 11 52 81 08
Atelier Galerie ATTIA
Exposition permanente
45 rue de la plage
50380 Saint Pair sur mer
Véronique ATTIA
Bio
Etats d’âme
À cet instant précis où le geste n’a encore rien accompli, la pensée génère des questionnements sans fin, des remises en question perpétuelles qui fragilisent l’édifice du moi.
Commencer à faire, c’est abandonner progressivement ses entraves et ses peurs.
Un peu comme se jeter à l’eau quoi qu’il en coûte. Dans le tumulte des flots, il faut agir vite, l’instinct de survie s’impose. On se débat, on boit la tasse, on lutte contre les éléments hostiles. On a cette volonté de rester en vie. Sans ce risque à prendre, j’ai comme l’intime conviction qu’il ne se passerait rien. Il y a une certaine forme d’exaltation et de vulnérabilité qui opère pour finalement permettre cette mise en mouvement. Pour Pablo Picasso, la peinture est Liberté. Quand on saute, on peut tomber du mauvais côté. Mais si on ne veut pas prendre le risque de tomber à plat ventre, que peut-on faire alors ? Dans ce cas, il vaut mieux ne pas sauter.
Lorsque je peins, il n’y a presque jamais la conscience précise du sujet, juste la prescience de quelque chose appelé à naître mais à ce stade ces visions surgissent comme au lendemain de certains rêves dont l’atmosphère persiste sans pouvoir en faire le récit.
Je ne sais pas ce que je vais peindre. Je rejoins encore une fois de plus le constat du peintre andalou que si l’on sait exactement ce qu’on va faire, à quoi bon le faire ?
L’envie de peindre est un Appel agissant comme une force capable de surmonter toutes les épreuves à venir. J’ai toujours le sentiment que le commencement d’une toile, c’est la première toile que je peins, comme si l’expérience du savoir se dérobait.
Pas d’esquisse au préalable : de la matière brute (par le biais de l’acrylique, l’huile, le papier, le tissu, les pigments, les craies grasses, les encres) surgit la forme qui va évoluer à la fois presque de façon aléatoire, intuitive au gré de multiples cheminements, tentatives, repentirs.
Tout n’est pas rattaché à ma volonté. Dès l’instant où la matière est projetée, elle existe par elle-même, comme l’encre glisse sur le papier, prend des chemins pour s’arrêter et produire des effets infinis et accrocher l’imaginaire de celui qui regarde. Les superpositions de matières occultent, laissent apparaître couleurs, traits et taches. Ils réalisent ensemble un palimpseste révélant ma sensibilité, sans cesse à la recherche de vérités cachées par d’autres vérités.
Le poème de Baudelaire Correspondances calque parfaitement avec ce que je peux ressentir et percevoir dans ces instants de création. J’entends de “confuses paroles”, je reconnais des sonorités familières. J’entrevois des espaces-temps qui me ramènent à des époques lointaines. Je sens par effleurement des réminiscences de cultures ancestrales, l’imprégnation de quelque chose de profondément primitif comme une obsession.
Le temps n’a aucune espèce d’importance. Parfois, des jours et des jours sur une toile et le sentiment d’avoir peint pour rien génère du désespoir comme une marche à tâtons dans un tunnel dont la sortie est condamnée. Mais ce chemin parcouru n’est pas vain, il me conduit vers une ou plusieurs issues. Et puis, il y a ces gestes fulgurants où tout se joue en quelques secondes avec au bout l’exaltation. Difficile de juger son propre travail. Plus que de satisfaction personnelle, il s’agit de savoir si l’on est allé au bout de quelque chose avec sincérité et exigence. Il m’arrive d’envier ceux qui savent où ils vont mais je sais que cela ne me correspond pas.
Alors, je reste convaincue qu’il faut s’accepter tel que l’on est, poursuivre son engagement, rester à l’écoute de nos mondes intérieurs comme ces signes que la nature laisse échapper.
Août 2020
Véronique ATTIA